raconte-nous ta vie.

Eun Kwang est né le 25 janvier 1989 à Séoul, premier enfant d'un couple à l'époque très amoureux, très solide. Ils étaient jeunes et pleins d'espoirs, certains que leur amour triompherait des obstacles que la vie posait sur leur chemin. Ils s'étaient rencontrés durant leur première année universitaire et se retrouvaient, à peine un an plus tard, mariés et sur le point d'avoir un enfant. C'est bien trop tard qu'ils ont réalisé à quel point ils étaient allés trop vite et qu'ils avaient sauté trop d'étapes. Ni l'un ni l'autre ne regrettait la naissance du petit ange qu'était Eun Kwang, mais ils ne ressentaient plus la même passion qu'au tout début. Sans réellement partager leurs pensées et leurs sentiments réels, toutefois, ils restèrent ensemble quelques années. Alors qu'il avait à peine 4 ans, Eun Kwang parti s'installer à Ulsan avec sa mère, qui avait maintenant un nouvel homme dans sa vie. Quelqu'un de respectable avec beaucoup d'amour à donner, tant à sa compagne qu'à son beau-fils. Eun Kwang n'ayant pas vraiment de souvenir du temps où ses parents n'étaient pas divorcés, il le considérait comme un second père, quelqu'un en qui il pouvait avoir totalement confiance et qui l'avait toujours encouragé. Il voyait son père le plus régulièrement possible, mais puisqu'il était resté à Séoul, la distance à parcourir était plus grande. Il y séjournait plusieurs semaines lors des vacances, ou c'était son père qui lui rendait visite à Ulsan. Lui aussi avait refait sa vie de son côté, avec une femme qu'il appréciait, mais avec qui il n'avait pas de lien affectif très développé vu le peu de temps qu'il passait en sa compagnie.

Sa petite soeur Eun Mi vint s'ajouter à la famille alors qu'il était âgé de 10 ans. Vu l'écart d'âge, il ne s'est pas tout de suite senti très à l'aise en sa présence. Ce n'était pas par dédain, mais plus par manque de maturité et de sens des responsabilités. Devoir s'occuper et protéger un si petit bébé représentait un défi énorme à relever, mais il tomba amoureux d'elle à l'instant même où sa mère la déposa dans ses bras. Elle était si fragile, si minuscule, il voulait lui épargner toute la douleur du monde. S'ils étaient jadis très proches, c'était parce qu'ils partageaient tous leurs secrets ensemble, même les plus embarrassants. C'est à elle qu'il a d'abord confié qu'il ressentait une certaine attirance pour les garçons, même si elle respectait qu'il souhaite continuer de le cacher et de sortir avec des filles. Elle n'était encore qu'une enfant, mais très mature pour son âge, qui comprenait bien plus de mystères de la vie que la majorité des adultes.

Eun Kwang n'était pas spécialement doué avec le sexe opposé. Il faisait tout en son pouvoir pour dissimuler son manque total d'intérêt pour ses petites-amies. Il s'entendait bien avec elles, il n'avait aucun problème à avoir l'air naturel lorsque venait le temps de les emmener manger quelque part ou de les inviter au cinéma, mais au niveau des rapprochements physiques, c'était plus difficile. Sa première petite-amie sérieuse est sans doute son histoire la plus marquante à ce jour, parce que même si elle a fini par découvrir le pot-aux-roses, ils sont restés très longtemps ensemble. Même après avoir fait l'amour ensemble, après avoir rencontré la famille de l'autre, après avoir eu des dizaines et des dizaines de rendez-vous... ce n'était pas le grand amour, de son comme du sien. Elle a finalement su pourquoi, mais n'a ressenti aucune honte à conserver les apparences et rester en couple avec lui pendant trois ans. Ils ont rompus lorsque Eun Kwang a reçu son diagnostic de cardiomyopathie et qu'ils ont réalisé qu'ils ne faisaient que s'empêcher l'un et l'autre d'avancer, parce que l'amour les effrayait. Ils sont tout de même restés bons amis.

Eun Kwang avait intégré l'Université d'Ulsan en langues étrangères après le lycée, de justesse vu l'état désastreux de son bulletin scolaire. La seule raison pour laquelle il fréquentait l'établissement était pour faire partie de l'équipe de soccer. Ils étaient assez solides, ce qui, avec un peu de chance, lui donnerait le plus de visibilité possible. Il faisait tout son possible pour étudier et obtenir des notes suffisantes pour conserver sa place au sein de l'équipe. Trois ans plus tard, il s'écroulait au cours d'un match important et après un nombre incalculable de tests et d'heures allongé dans un lit d'hôpital, on lui apprenait la nouvelle: cardiomyopathie dilatée de forme idiopathique. En d'autres termes, la cause est inconnue, puisqu'il n'abusait ni de drogues, ni d'alcool et qu'il n'y avait pas d'historique d'un tel problème de santé dans sa famille rapprochée. De se sentir si impuissant face à sa soudaine condition lui fit réaliser à quel point le monde autour de lui était injuste. Durant son séjour à l'hôpital, il pris conscience des enfants qui souffraient, de tous ceux qui mourrait subitement. Ce qui pouvait d'ailleurs lui arriver à tout moment.

Au départ, on lui disait que ça n'était pas si mal. Les symptômes seraient rares, il n'aurait qu'à suivre un régime pauvre en sel, faire de l'exercice, prendre des médicaments et rencontrer régulièrement son médecin. Il ne pouvait cependant pas conserver sa place dans l'équipe d'Ulsan, parce que l'effort physique était beaucoup trop demandant et son coach n'accepterait jamais qu'il prenne un tel risque. Puisque plus rien ne le retenait à l'université, il laissa tomber ses études et commença à travailler à la boutique de soccer, espérant voir son état de santé s'améliorer. Ce fût tout le contraire. À l'été 2013, il fût pris d'un nouveau malaise, cette fois beaucoup plus grave. L'état de son coeur s'était considérablement dégradé et le risque pour sa vie était de plus en plus élevé. Vu son jeune âge et après avoir longuement discuté avec son médecin, on le plaça sur la liste d'attente pour une greffe. Il pouvait être appelé à toute heure du jour et de la nuit, mais l'appel ne vint pas. Il sait que ça peut prendre des mois, mais plus le temps avance et plus son humeur s'assombrit.

Eun Kwang n'a pas vraiment le choix de travailler, mais il l'aurait fait peu importe sa situation financière. Ses parents ne sont pas extrêmement fortunés et ne peuvent se permettre de dépenser d'astronomiques sommes d'argent pour payer les factures des traitements de leur fils. Ils aident comme ils peuvent, mais Eun Kwang doit aussi travailler pour gagner sa vie. Malgré l'instabilité de son état de santé, il ne souhaite pas se couper du reste du monde et vivre en ermite en attendant le moment de sa mort. Il est conscient de ce qu'il est capable d'effectuer comme charge de travail et il a longuement discuté avec son médecin qui a dit que ce serait une bonne idée qu'il devienne assistant coach pour une équipe de soccer. Sans trop s'exténuer, il serait en contact avec ce qui le garde en vie, tout en prenant un bon bol d'air frais et en faisant un peu d'exercice. Il ne doit jamais trop en faire, mais il peut tout de même assister à des matchs et aider les joueurs à s'améliorer. Il travaille donc avec l'équipe de l'Université d'Ulsan depuis quelques mois.

Cet emploi ne lui permettant pas de subvenir à ses besoins, il a également été engagé dans une boutique d'articles et de vêtements de soccer, où il travaille depuis près de quatre ans maintenant. Il ne sait pas s'il retournera un jour aux études, il ne saurait d'ailleurs pas quoi faire et n'a jamais été très studieux. Il aimerait peut-être éventuellement gérer sa propre boutique, qu'il aménagerait comme il le souhaiterait, mais il est encore hésitant. Il a de la difficulté à aller de l'avant. Cela dit, à défaut de lui rappeler brutalement ses espoirs perdus d'intégrer une équipe professionnelle, approcher différemment sa passion lui a fait le plus grand bien, surtout depuis qu'il est assistant coach.

parle-nous de toi.

Il faut d'abord déterminer à quelle version de Eun Kwang on fait référence: l'avant maladie ou l'après? C'est immensément important si on veut avoir l'heure fixe. Beaucoup comportements qui peuvent sembler étranges aux yeux de plusieurs s'expliquent un peu si on comprend ce qui lui est arrivé. Cela dit, sa maladie est loin de tout excuser, et il n'en est que trop conscient. Sa phase de déni étant terminée, il est récemment entré dans une étape beaucoup plus difficile; celle de devoir poursuivre sa vie le plus normalement possible, tout en sachant que rien ne sera plus comme avant. Il a fait le deuil de plusieurs choses, notamment son plus grand rêve, qui était de devenir un joueur de soccer professionnel. Sa condition ne le lui permet évidemment plus. C'était le seul rêve qu'il avait réellement, parce que n'ayant jamais été un élève assidu avec de bons résultats, il n'envisageait pas de grandes études. Pour ce qui est des arts de la scène... il ne chante que sous la douche et encore... puis il a un sens du rythme absolument désastreux. Que restait-il, alors? Le sport. C'était sa façon à lui de vouloir contribuer à la société, de s'épanouir, d'enfin devenir quelqu'un de respectable et de respecté. Mais voilà que ce rêve lui a filé entre les doigts.

Eun Kwang était - et au fond, il l'est sans doute toujours - un garçon très vivant, très énergique. Il n'était pas un excellent élève, mais il ne causait pas de problèmes, il était en général apprécié du personnel et de ses camarades. Il se distinguait grâce au sport, c'était ainsi qu'il se défoulait, parce qu'en dehors du terrain, il était plutôt calme. Son impulsivité et sa tendance à n'en faire qu'à sa tête lui valait parfois des prises de becs bien méritées. Il a toujours aimé être en contrôle et diriger les autres, il accepte mal la critique et encore moins sentir qu'il dépend des autres. Jouer au sein d'une équipe était un réel défi pour lui, il lui arrivait souvent de se chamailler avec ses coéquipiers pour des enfantillages, mais il a vite appris à prendre sa place et à en laisser sur les autres le jour où son coach lui a offert l'engueulade de sa vie. Toutefois, il n'est pas quelqu'un de méchant, loin de là. Que ce soit avant ou après la maladie, il n'a jamais démontré une quelconque agressivité. Il recherche seulement la perfection, le dépassement de soi, mais c'est quelque chose d'impossible à atteindre, et il ne l'aura compris que trop tard.

La maladie est entrée en conflit direct avec cette partie de lui qui réclame son entière indépendance. Il ne décide pas du jour où son coeur va flancher, ni du moment où il recevra enfin sa greffe. Non seulement elle a brisé son plus grand rêve, mais elle le rend dépendant d'elle. Sa condition peut s'aggraver du jour au lendemain, il pourrait même éventuellement être cloué dans un lit en position semi-assise pour une éternité. Ça lui a fait comprendre à quel point la vie ne tient qu'à un fil et il ne prend rien pour acquis, mais il n'a pas encore réussi à se sortir de cette phase pessimiste qui commence à le ronger de l'intérieur. Il se demande pourquoi il continue de se battre, qu'est-ce qui se trouve devant lui qui vaut tellement la peine. Il est constamment inquiet, pour lui, pour sa petite soeur, pour ses parents... pour tous les gens qu'il aime et qui l'aiment. Il est devenu taciturne, toujours dans sa bulle dès qu'il rentre chez-lui, ne sortant plus beaucoup. Il semble avoir perdu cet éclat dans les yeux qui brille lorsqu'on a un but, un rêve, une passion. Il est nostalgique d'avant, du temps où tout allait bien et ça le met dans une telle colère d'être devenu si amer face à la vie qu'il ne sait même pas par où commencer pour s'en sortir. Il a une réelle volonté de retrouver le sourire, mais il manque de courage. Il est hésitant à se rapprocher des autres ou à partager ne serait-ce qu'une parcelle de lui-même, parce qu'il craint que tout bascule ou de blesser qui que ce soit.

toi, dans la vraie vie.

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